[Critique] Gravity Daze

Il est une expression qui dit : « qui aime bien châtie bien » j’aimerais y ajouter, « qui aime beaucoup châtie encore mieux ». C’est exactement ce que je vais m’employer à faire pour ce Gravity Daze. Jeu interne à Sony, il semble avoir été originellement développé pour la PS3. Il est aussi le fait du créateur de jeu Keiichiro Tôyama, papa des séries d’horreur mythiques Silent Hill et Forbidden Siren, étonnante parenté que celle-ci. Mais quand on a joué à Gravity Daze, peut-être en trouve-t-on les vestiges dans le scénario et ses moments de folie. Je vais tenter ici de vous donner mon avis sur ce jeu atypique, enchanteur et, dans mon cas, décevant et énervant. Mais comme je le disais plus haut, c’est uniquement parce que l’on aime que l’on est difficile et dans le cas de ce jeu j’ai adoré.

Une technique, maniabilité, direction artisitique : all green!

Ce qui marque tout d’abord, c’est la beauté et la maîtrise de la technique en même temps que la direction artistique. Deux mots sur la technique, l’aliasing est bien présent mais le tout est parfaitement maîtrisé, on peut voir la totalité de l’aire de jeu sans pour autant souffrir de graves ralentissements, ralentissements qui sont très rares. On notera aussi des temps de chargement assez longs qui cassent un peu le rythme mais rien de trop grave. En somme la PS Vita est parfaitement exploitée. Il va falloir s’y faire, les studios Sony savent tirer le meilleur de la machine pour notre plus grand bonheur.

La maniabilité de Gravity Daze basée sur la gravité est, en plus d’être très originale, une vraie réussite. En quelques mots, le bouton de tranche droit (le bien nommé « R ») sert à activer le pouvoir de notre héroïne qui se mettra alors à flotter dans l’éther une autre pression la fera « chuter » dans la direction visée. En d’autres termes, elle sera projetée dans cette direction. Si l’on projette Kat contre un mur, un plafond, sur n’importe quelle surface en fait, elle s’y accrochera et il lui sera alors possible de l’arpenter. Elle se retrouvera ainsi à marcher au plafond. Ce sont ses cheveux et vêtements qui rappelleront dans quelle direction se trouve la gravité réelle et ce ne sera pas de trop tant on se retrouve parfois à ne plus savoir où l’on est. Enfin, une troisième pression la fera s’arrêter et le bouton gauche (« L » pour les intimes) rendra au monde sa gravité originelle, l’héroïne chutant alors vers le sol.

La direction peut être orientée via le stick droit mais aussi le gyroscope. On peut voir celui-ci comme un moyen d’affiner sa visée. Notre petite Kat (nom de l’héroïne) gagnera plusieurs pouvoirs au fil de l’aventure. Parmi ceux-ci, des super pouvoirs utilisables uniquement après un certain temps et dont le déchaînement permet d’éclater la gueule aux vilains Nevi. A ces super-pouvoirs s’ajoutera la capacité de glisser sur le sol. Il s’agit sans doute de la capacité la moins bien implémentée, et cela malgré le fait que la capacité en elle même soit bonne. Le problème est que l’on doit diriger Kat en utilisant un gyroscope particulièrement mal calibré rendant la maniabilité hasardeuse. Une dernière capacité permet grâce à une bulle de gravité de soulever des objets qui voleront ensuite autour de Kat. Elle pourra les projeter sur ses ennemis ou bien encore les transporter d’un point A à un point B.

Un zeste de Rpg

Obtenir ces capacités se fera par un système de collection de « gemmes précieuses » (プレシャスジェム). De couleur rose, celles-ci permettent, comme dans un RPG d’augmenter diverses capacités de Kat, car oui, on ne commence pas l’aventure avec toutes les capacités à leur maximum. Ainsi il faudra augmenter son énergie pour voler plus longtemps, la puissance de ses coups pour abattre des ennemis de plus en plus puissants ou encore sa vitesse de chute et le nombre d’éléments que l’on pourra transporter. Un système plutôt malin qui permet de voir le maniement de Kat évoluer au fil du jeu. Toujours est il que la maniabilité par son originalité et sa maîtrise donne des sensations jusque là jamais ressenties dans un jeu vidéo et c’est bien de là qu’il tire sa force. Depuis le TGS j’attendais ce jeu dont la liberté gravitationnelle m’avait fait rêver. Il m’en fallait plus et je dois dire que sur ce plan là, je n’ai pas été déçu. C’est un vrai bonheur.

Et si la maniabilité en apesanteur ne déçoit pas, le level design n’est pas non plus en reste. Kat se retrouve plongée dans l’univers étrange d’Hexaville. Il s’agit d’une ville montée sur un pilier central et séparée en plusieurs branches, plusieurs univers dont je vous laisse la joie de la découverte je peux simplement dire que chacune des zones, bien que restant urbaines sont bien différentes les unes des autres. C’est à chaque fois un plaisir des les arpenter. La foule est bien présente et bien animée, les plus pervers pourront s’amuser à faire voler les passants pour les projeter ensuite dans le vide (non je ne suis pas un malade!). On en sera jamais perdu, le jeu nous indiquant toujours, soit sur la carte, soit par un point de passage le prochain objectifs, tout au plus pourra on se perdre en flânant à travers les airs.

Cependant, si la direction artistique et la réalisation technique ont permis la création d’un univers tout à fait singulier, le scénario et le gameplay ne parviennent que très difficilement à lui faire honneur. Si le character design est bon, et si les phases de dialogue en bande dessinée s’inspirant du grand Moebius ou encore des univers de Peeters et Schuiten sont superbes, que dire de ces personnages stéréotypés et ennuyeux, l’héroïne, Kat donc accompagnée par Dusty, son chat gravitationnel, celui qui lui donne son pouvoir, est, disons le tout de suite, une gourde.

Un trou noir scénaristique 

Elle est amnésique quand elle arrive sur Hexaville et le restera par ailleurs jusqu’à la fin, elle se contentera du nom que lui donnera un inconnu et ne se posera plus de questions. Peut-être retrouvera t’elle la mémoire par la volonté de saint DLC. Le scénario oscille entre le WTF et le crétin le plus basique et ce ne sont pas les intertitres en français dans le texte faisant référence à des films et autres œuvres de notre beau pays qui y changeront quoi que ce soit. C’est d’autant plus désespérant que le coté wtf du scénario aurait été très intéressant. Certains passages très singuliers sont surprenants et enthousiasmants. Si seulement il n’avait pas été servi par des personnages aussi monolithiques et classiques et un scénario aux éclairs de génie trop rares. Car oui, on ne cite pas la littérature française impunément, c’est encore plus dommage quand l’on réfléchit à ce que cela aurait pu être si une vraie réflexion sur le totalitarisme, l’abandon, la perte de soi ou encore le vertige avait pu être faite. Et non pas une gamine qui combat les méchants parce qu’elle ne les aime pas et parce que « ce n’est pas bien ». Le jeu ne répond a aucune question, qui somme nous, qui sont les méchants, pourquoi ce pilier central? Pourquoi?

Le jeu vidéo manquera-t-il toujours son rendez-vous avec l’intelligence ? Je dis ça, je suis méchant, il y a des jeux qui y parviennent avec brio mais Gravity Daze est de ceux desquels on pouvait espérer ce type de traitement. J’espère vraiment que ce jeu à été fini dans la précipitation car si la maniabilité et la technique sont parfaitement maîtrises, le scénario n’apportera strictement aucune réponse et n’aura de cesse de nous faire poser plus de questions sur le pourquoi du comment sans jamais y apporter plus que des éléments de spéculations. Il n’y a pour moi pas de pire scénario que ceux qui créent de la complexité pour donner l’impression de l’intelligence alors que cela ne fait que cacher le manque d’inspiration.

De plus, l’univers de Gravity Daze est, je trouve, vide, certes l’héroïne rencontrera nombre de personnages secondaires mais la ville, elle, mis à part de rares conversations à droite et à gauche n’offre pas il me semble d’interactions significatives, tout au plus représente-elle un obstacle dans nos pérégrinations gravitationnelles. Ce n’est pas vraiment un problème en soi mais je reste persuadé qu’il y avait bien plus à faire, des magasins, des missions diverses et variées. Celles qui nous sont proposées de manière récurrente, je ne parle pas de la quête principale de l’histoire mais bien de missions qu’il est possible de refaire. Placées à des point fixes, elles sont de 3 types: course (time attack car personne ne nous tire la bourre), combat et transport. Les missions de course elles, connaissent trois itérations, la course libre qui fait commencer l’héroïne avec toute son énergie, la course uniquement en glissade et la course où il faudra ramasser des gemmes d’énergie pour utiliser son pouvoir. Il est possible de gagner des gemmes rouges en quantité de plus en plus élevée suivant que l’on gagne le bronze, l’argent ou l’or sachant qu’une fois gagné, battre une nouvelle fois le high score ne rapporte rien sinon la gloire sur le ladder internet ou parmi vos amis.

Une sous-utilisation de l’univers

Si tout cela est très bien, force et d’admettre que l’on aurait aimé plus de variété et peut-être aussi plus de mise en contexte, plus de vie en somme. Les missions de transport auraient très bien put avoir lieu n’importe où, comme l’on prendrait une course dans Crazy Taxi ou une mission dans GTA. Il en va de même pour les missions de combat où l’on fini par faire des aller-retours sur des ennemis apparaissant toujours au même endroit. Si l’héroïne a le pouvoir de chuter dans le vide, il est dommage de voir l’univers en faire de même car à l’image de ces missions précisément définies, précisément placées, la ville semble ne pas parcourir les veines d’Hexaville. J’aurais aimé beaucoup plus, des missions diverses, des personnages qui ne seraient pas les 5 que l’on croise tout au long de l’aventure et qui déménagent opportunément à chaque nouvelle zone, avoir une vraie responsabilité dans cet univers.

Mes soupçons de ce qui me semble être un manque de finition ne firent qu’augmenter quand je vis que la dernière zone du jeu, la plus immense et celle qui aurait permis le plus de choses est totalement sous-exploitée. La vérité m’apparue clairement lorsqu’en ouvrant l’onglet des missions je remarquait qu’un tiers de l’écran était vide et surmonté de la mention terrible « DLC ». Cependant, le jeu n’est pas court et entre six et sept heures seront nécessaires pour le terminer, beaucoup plus si l’on fait les extras.

In fine

Gravity Daze est une immense réussite et une déception. Une immense réussite car la maniabilité est la et les sensations sont fantastiques, jamais je n’avais ressentis de telles choses dans un jeu vidéo, flotter librement dans les airs quel plaisir, quelle libération ! Ce à quoi vient s’ajouter un univers de toute beauté, chaque zone de la ville est magnifiquement modélisée et possède une identité propre, une identité forte à quoi s’ajoute des personnages au design réussi et de beaux passages en BD. Une déception car le scénario qui semble avoir de grandes ambitions se heurte à la vacuité de ses propres personnages et d’un univers que l’on n’aura pas su faire vivre comme il se doit, comme il le méritait. Comme je l’écrivais en introduction les déceptions ne se mesurent qu’à l’amour que l’on porte pour quelque chose et ce Gravity Daze, je l’aime, peu de jeux ont su me donner de telles sensations et en même temps j’aurais aimé qu’il soit parfait sur tout les plans. N’hésitez cependant pas, la complainte d’un amoureux transit ne devra pas vous détourner d’un jeu fantastique, le jeu de la Playstation Vita. Et qui sait peut-être que je serai le seul à critiquer le scénario.

Les Plus

– Maniabilité originale et (presque) parfaitement maitrisée.
– Design superbe.
– Maitrise Technique.

Les Moins

– J’attends que l’on nous annonce la fin en DLC.
– Personnages prévisibles (sauf un peut-être).
– Scenario décousu sans vrai fil conducteur qui se perd dans lui même et n’accouche que d’un « pfffffff » .

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